Le pâturage tournant dynamique : La même prairie, deux fois plus productive ?
Ce 25 août, nous avons eu le plaisir d’accueillir pour la première fois, en tant qu’orateur dans le cadre de notre formation, Christophe Sudraud. Originaire de Bourgogne–Franche-Comté, Christophe est vétérinaire, spécialiste en santé des troupeaux et en gestion des systèmes fourragers. Fort de 16 ans d’expérience, il parcourt aujourd’hui la France pour former agriculteurs et conseillers à une approche intégrée de la gestion des systèmes fourragers.
Lors de cette 6ième session de l’édition 2025 de la formation, Christophe nous a notamment partagé son expertise sur le pâturage tournant dynamique. En voici un bref aperçu.
Le pâturage tournant dynamique, qu’est-ce que c’est ?
Le pâturage tournant dynamique (PTD) est une méthode de gestion de l’herbe qui vise à exploiter au maximum le potentiel d’une prairie.
Plutôt que de laisser les animaux pâturer librement une grande surface, on divise les prairies en paddocks, on augmente le chargement mais on réduit la durée de présence, et on déplace régulièrement le troupeau en respectant le cycle de la plante.
L’idée centrale du pâturage tournant dynamique est simple :
- Pâturer les graminées au stade 3 feuilles, moment où leurs réserves sont reconstituées et où la digestibilité est maximale.
- Limiter le temps de séjour (3 jours max.) pour éviter que les repousses ne soient broutées trop tôt.
- Sortir les animaux au stade 1 feuille, avant qu’ils n’entament la gaine, afin de préserver la plante et garantir une repousse rapide et vigoureuse.
En résumé, l’objectif du PTD est de maintenir un équilibre durable entre la plante, le sol et l’animal afin d’assurer à la fois la productivité et la fertilité de la prairie.
Quels sont les bénéfices du pâturage tournant dynamique ?
Adopter le PTD, c’est récolter plusieurs avantages:
- Productivité accrue : +30 à +50 % de rendement de la prairie, sans surfaces supplémentaires.
- Qualité alimentaire supérieure : les animaux consomment une herbe jeune, appétente et hautement digestible.
- Santé et résilience des prairies : le système racinaire se développe davantage, rendant la prairie plus résistante aux sécheresses et aux aléas climatiques.
- Gestion homogène du couvert : meilleure répartition des déjections, moins de refus, meilleure maîtrise des adventices.
- Réduction des intrants : la prairie, bien conduite, exprime son potentiel sans recourir massivement aux engrais azotés. Comme le rappelle Christophe Sudraud : « l’azote minéral n’est pas le moteur de la prairie ».

Comment le mettre en place efficacement ?
La réussite d’un PTD repose sur une combinaison de planification rigoureuse et d’observation constante. Voici les points essentiels :
Subdivision des prairies
Privilégier des paddocks les plus homogènes possibles et de forme simple, avec des points d’eau facilement accessibles. Cela facilite la gestion et limite les refus.
Chargement
Le chargement dépend de la biomasse disponible et de l’ingestion journalière des animaux. En pratique, on estime la biomasse par hectare, puis on calcule le nombre de bêtes pouvant rester sur une surface donnée pour une durée courte (souvent 3 jours).
Exemple : Pour nourrir pendant deux jours 20 vaches limousines gestantes qui mangent 13 kg par jour avec une prairie de densité 1200 kg de MS / Ha, la taille des paddocks devra être de 43 ares – Manuel PTD innov-eco2
Gestion de la variation de pousse au cours de l’année
En période de pic de pousse, il faut éviter que l’herbe dépasse le stade 3 feuilles. Les solutions : fauche, introduction d’un second lot d’animaux ou accélération temporaire de la rotation en réduisant la période de repos à 18-22 jours (à adapter en fonction de la situation)
Anticiper le ralentissement estival de la pousse : allonger les temps de repos (28–35 jours), laisser davantage de hauteur résiduelle pour protéger le sol, réduire le nombre d’animaux et si besoin privilégier le pâturage nocturne en période de fortes chaleurs. En été, en cas de sécheresse prolongée, il peut être nécessaire de complémenter les animaux pour éviter le surpâturage voire de les placer dans un paddock « parking » de façon temporaire pour éviter le surpâturage sur l’ensemble des paddocks.
A l’automne (reprise après la sécheresse), attendre le stade 3 feuilles avant d’y remettre les animaux. Les rotations doivent être plus longues (30–45 jours) afin de préserver les réserves pour l’hiver et le printemps suivant.
En résumé
Le pâturage tournant dynamique est bien plus qu’une technique : c’est une stratégie globale de gestion des prairies, qui combine science de la plante, gestion du troupeau et observation quotidienne.
C’est un système exigeant mais rentable : avec la même prairie, vous pouvez produire jusqu’à 50 % de fourrage en plus, tout en renforçant la résilience de votre exploitation.