Champignons mycorhiziens : Les alliés invisibles de la fertilité

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20 Mai 2025

La semaine dernière, nous avons eu la chance d’accueillir Hervé Coves à l’occasion de plusieurs évènements organisés en partenariat avec la coopérative CultivAE et le GAL culturalité. Tout d’abord, deux tours de plaine spécifiquement pour les agriculteurs, le lendemain un atelier pour les agronomes et enfin, une conférence grand public. Cet article est un condensé de ce que nous retenons de ces différents évènements.

A propos d’Hervé Coves 

Agronome Français, ancien chercheur en mycologie, il accompagne aujourd’hui des agriculteurs dans la mise en place d’aménagement agroforestiers.

Les champignons de nos sols

On retrouve dans le sol, deux grands types de champignons dans les sols : 

Les champignons mycorhiziens :

Les mycorhizes sont des champignons invisibles à l’œil nu,  qui vivent en symbiose avec les racines des plantes. Ils forment un réseau souterrain interconnecté qui permet aux plantes de mieux absorber l’eau, le phosphore et l’azote, de transmettre des signaux de défense, et de partager de l’énergie entre elles. Ce réseau fonctionne comme un système racinaire étendu.

champignons mycorhiziens

Les champignons saprophytes :

Les champignons saprophytes, quant à eux, sont visibles à l’œil nu et ne forment pas de symbiose avec les plantes. Ils dégradent la matière organique morte, principalement les matières organiques lignifiées, ils jouent un rôle clé dans le recyclage des nutriments. En créant des faisceaux mycéliens, ils structurent le sol, densifient les connexions vers les ressources, et contribuent à la formation de microporosité, améliorant ainsi la réserve en eau du sol.

Pourquoi s’intéresser aux champignons de nos sols ?

Ils jouent un rôle important dans l’accès aux nutriments et à l’eau par les plantes, en permettant notamment  : 

De rendre le phosphore biodisponible

Le phosphore est un nutriment essentiel pour les plantes. Actuellement, l’agriculture dépend énormément des engrais minéraux pour la fertilisation en cet élément. En effet, le phosphore est un nutriment qui devient rapidement immobilisé dans le sol et c’est également le cas après une application d’engrais. Sa solubilisation dépend énormément de l’activité biologie des sols. 

Les champignons mycorhiziens sécrètent des acides organiques capables de solubiliser le phosphore immobilisé. De plus, avec leur réseau d’hyphes qui augmente la surface d’exploration des racines, ils permettent à la plante d’accéder à des réserves de phosphore situées hors de portée. Cette caractéristique est d’autant plus intéressante que la disponibilité en engrais phosphatés se fera rare à l’avenir. 

Ils améliorent la disponibilité de l’azote

C’est particulièrement le cas lorsqu’ils sont en symbiose avec des légumineuses (ex. trèfle). Un trèfle non mycorhizé libère lors de sa destruction 30 unités d’azote, contre jusqu’à 110 unités en symbiose.

Ils augmentent la rétention d’eau dans les sols

+1 % de champignons dans le sol permet de retenir 200 m³ d’eau supplémentaires par hectare, ce qui est crucial face aux sécheresses croissantes.

L’agriculture moderne est-elle compatible avec le maintien de réseaux mycorhiziens ? 

Les limites actuelles : 

  • La majorité des sols agricoles ne maintiennent pas les réseaux mycorhiziens actifs. En effet, le travail du sol, les longues périodes sans racines vivantes et l’application régulière de fongicides sont des freins à l’installation de réseaux durable 
  • Beaucoup de cultures modernes ne mycorhizent plus. C’est le cas des variétés modernes de blé car cet aspect ne fait pas partie des critères de sélection.

 

Comment favoriser l’installation de champignons mycorhiziens dans nos parcelles ? 

Bâtir un écosystème accueillant, apporter le gîte et le couvert :
  • Apporter régulièrement des matières organiques, nourrir le sol. Viser 2,5 t/ha de vers de terre (soit environ 3 vers/coup de bêche).
  • Maintenir des racines capables d’interagir avec un réseau de mycorhize
    • Comment ? Réintroduire des plantes pérennes dans le système, elles permettront de maintenir les mycorhizes lorsque la culture n’établit pas de relation symbiotique. Un arbre adulte peut former un réseau mycorhizien de 15 à 25 m de rayon. Implanter le plus rapidement possible un couvert végétal qui contient des légumineuses après toute culture
  • Associer une légumineuse aux cultures qui ne mycorhize pas ou peu (ex : colza,betteraves, blé)
  • Réduire l’intensité du travail du sol, notamment la profondeur afin de ne pas détruire l’ensemble du réseau lors de passages mécaniques et de maintenir un réseau qui sera colonisé par les racines du couvert ou de culture qui suit. 

 

Remarque : L’inoculation de micro-organismes dans un sol appauvri est souvent inefficace sans matière organique vivante. De plus, le vivant s’adapte mieux naturellement. Par exemple, les oiseaux migrateurs transportent les spores fongiques sur des milliers de kilomètres, ils ensemencent naturellement les terres… à condition que celui-ci soit un écosystème accueillant.

En conclusion

Les champignons mycorhiziens sont l’un des fondements oubliés de la fertilité. Ils régulent l’eau, relient les plantes, débloquent les nutriments et permettent à l’agriculture de se réconcilier avec la biologie du sol.

Ils nous rappellent que le sol n’est pas un simple support, mais un écosystème intelligent, nourricier et coopératif.

« La vie est belle ! »  – Hervé Coves

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En savoir plus sur Hervé Coves et sa vision de la vie des sols ? Ecoutez le podcast !

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