La rotation des cultures, Clé de voûte trop souvent négligée
Un salissement qui s’installe.Une culture de printemps imposée faute d’alternative.
Des rendements qui plafonnent…
Bien souvent, le problème ne vient pas de la technique employée, mais de la rotation des cultures.
Dans de nombreuses fermes, l’assolement se décide d’année en année, peu avant la récolte : selon le marché du moment où le précédent immédiat. Pris par l’urgence et la charge de travail, les agriculteurs n’ont pas toujours le temps d’anticiper les enchaînements.
Résultat : la rotation devient une variable d’ajustement, or elle conditionne de nombreux paramètres: la fertilité, la maîtrise du salissement et des bioagresseurs, l’organisation du travail et la stabilité économique.
C’est précisément à ce niveau que l’agronome pourrait jouer un nouveau rôle clé. Actuellement, il est encore souvent amené à répondre à une problématique ponctuelle, une culture en difficulté, un parasite à contrôler, une impasse technique à lever => il intervient a posteriori. Passer de cette logique d’intervention curative à une approche systémique et anticipée, voilà l’enjeu.
Diversifier l’assolement, ce n’est pas seulement varier les cultures. C’est aussi réduire naturellement la pression sanitaire jusqu’à 63 % (l’INRAE).
Et lorsqu’on commence à s’intéresser sérieusement à la rotation, les questions se multiplient…
Quelles cultures intégrer ?
Comment arbitrer entre besoins économiques, opportunités de marché et charges de production ou de travail ?
L’introduction de légumineuses, par exemple, permet d’économiser 30 à 40 kg d’azote minéral par hectare sur la culture suivante (Arvalis, Plein Champ, 2022). Dans un contexte de prix volatils, cette autonomie azotée devient un levier économique majeur. De plus, l’intégration des légumineuses ou d’autres cultures à forte biomasse contribue à maintenir la fertilité à long terme en enrichissant le retour de matière organique (FAO 2005).
Mais là encore, de nouvelles questions surgissent :
Quelle(s) légumineuse(s) choisir ?Dans quel enchaînement l’intégrer pour maximiser les bénéfices agronomiques et économiques ? Comment raisonner cet enchaînement pour optimiser le retour de biomasse à l’échelle de la rotation ?
Concernant les apports organiques exogènes, où les placer, sous quelle forme et à quelle dose ?
La rotation conditionne également le travail du sol. Préserver la portance et la stabilité structurale suppose d’anticiper les cultures à venir. Sans cette anticipation, on se retrouve vite contraint d’implanter dans de mauvaises conditions, avec pour seule option un travail invasif qui fragilise la structure.
D’où la question : comment concevoir des rotations qui évitent ces impasses ?
Au final, la rotation c’est une affaire de stratégie. Pour qu’elle soit réellement adaptée, il faut jongler avec :
- les contextes pédologiques des parcelles;
- les contraintes et opportunités réglementaires (PGDA, BCAE, éco-régimes) ;
- les réalités économiques de l’exploitation et les débouchés de marché ;
- les objectifs agronomiques : réduire la pression sanitaire, maintenir ou accroître la fertilité, préserver la structure des sols.
C’est un véritable exercice d’équilibriste, où chaque choix influence l’ensemble du système.
Dans cette complexité, l’agronome apporte un regard essentiel en aidant à hiérarchiser les priorités, à mesurer les compromis et à transformer cette équation en stratégie de long terme.
📣 Et vous, en tant qu’agronomes
- Accompagnez-vous les producteurs dans la construction de leur rotation pour qu’elle devienne une stratégie choisie plutôt qu’une variable d’ajustement ?
- Quelle approche utilisez-vous pour aborder ces questions ? Et quelles difficultés rencontrez-vous pour le faire davantage ?
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